Le froid a glissé sa main dans ma nuque. L’air est d’un gris poussiéreux. Le temps coule lourd comme du plomb. En fusion. La rage couve. Sous le bleu laine et sous la peau tachetée, un cœur bat jusque dans la gorge et cogne. Tout est sombre, terne plutôt. Mais dessous la lave de la colère monte en ébullition. Les façades et leurs camaïeux de beige sale et gris s’alignent comme des cibles le long de la rue. Les couleurs ont déserté leurs joues comme le sang quitte le visage en colère. Que le gris s’effiloche en nuage ou se déchire en flocons… que le vent vienne et qu’il balaie le front soucieux du ciel.
J'ai 10 ans. Je sais que c'est pas vrai. Mais j'ai dix ans. C'est pas vrai, j'ai vécu tant d'éclosions de fleurs. Avant, mes pieds touchaient la terre. Je marchais dans la boue. Mes yeux, couleurs de chêne, se levaient pour voir le bleu. Maintenant je suis dans le bleu, je flotte et j'ai dix ans. Même si c'est pas vrai. Ma mère, quand elle m'appelle dit Anou-k A nous... K. Ke veux-tu ? Kue fais-tu ? K'est-ce Ki se passe ? ANOU K Mon père ne dit rien. Il grogne. C'est un grognon. ou un grogneur. Il ne sait pas pourquoi. Il imite. il singe. Ou il est de mauvaise humeur. Il grogne. C'est tout. Je suis grande comme... moi. Papa a mis un coup dans l'arbre juste à ma hauteur, dans le tronc. J'ai deux pieds, deux mains. J'adore mon nez, je veux dire j'adore sentir par mon nez. Le vert sent le mouillé. Le bleu sent le soleil. Le rouge sent les baies avec maman ou la viande avec papa. J'ai les cheveux le long de mes joues o...
Les cheveux emmêlés dans tes doigts, je regarde dans la profondeur de tes yeux. Il est plus tôt que tu ne penses. L'oreille assourdie par le coussin, je vole avec toi. Quelques minutes sur la nuit. La journée harassante nous a emmenés jusque dans le ventre des forêts pour y chercher l'ombre et des champignons. Les rayons obliques dans la verticalité des troncs traçaient des tirets diagonaux sur ton visage. La lumière caressait ainsi ta joue avec la tendresse chaude des après-midis de fin d'été. Nous nous perdions entre les hauts arbres anonymes. Le regard et la tête penchés, nous cherchions de l'œil à dénicher ici un cèpe, là un bolet. La tête me tournait à force de ne plus avoir de repère fixe. j'entendais bruisser des pas dans les premières feuilles tombées. Les tiens, tantôt tout proches, tantôt plus éloignés. Le geai avait chanté à notre arrivée, depuis un silence soupçonneux régnait. La respiration sèche de la terre sous le poid des pieds s'élevait en pous...
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