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Affichage des articles du mai, 2021

La chaise est de travers

La chaise est de travers, en biais par rapport à la fontaine. Elle a une assise profonde et des accoudoirs. On la trouve à Paris, toujours dans ses parcs et jardins. Celle que je pousse un peu pour la remettre en face de la fontaine et de sa bruine bienvenue se situe dans les jardins du Palais Royal. Il est midi, j’ai rendez-vous là avec mon frère. Il apportera des sandwichs au Comté et au San Daniele et du faux jus d’abricot dans une bouteille d’eau. En passant par l’entrée latérale, je suis tombée sur des bleus de Chine qui dessinent dans l’air et de leurs corps de fines arabesques. Cette chorégraphie matinale soulève mon cœur d’une légèreté que la pratique du Tai Chi m’a permis de conforter. Il fait maussade et je suis d’une humeur grise. Entre les colonnes de Buren, je regarde si je le vois, l’homme. Quel homme ? Et bien vous devez déjà l’avoir vu, dans son pardessus, il se déplace les bras en croix recouverts de moineaux et mésanges qui volettent jusqu’au bout de ses doigts

Je ferme les yeux parfois. Et je m'évade

Je ferme les yeux parfois. Et je m’évade. Je vois des paysages imaginaires mais je les visite brièvement. C’en est fini de ces grandes épopées. Quand je traversais les heures sombres de mon imaginaire en fabriquant de toutes pièces des rêves multiples et complexes. Ou pas. Au début, je m’en souvenais bien de mes rêves. Je me rappelais surtout les heures volées à la guerre où je rêvais de toi, Mareike, de tes yeux clairs et de ton sourire gracile. Tu étais ma respiration, mon repos. Je t’ai retrouvée après la Grande Guerre et des mois de convalescence. Je n’étais plus le bel homme fringant que tu avais connu. Mais tu m’as retrouvé, reconnu, malgré mes différences. Depuis nos retrouvailles, tu t’es habituée à ma gueule cassée, tu retrouves dans mes yeux, dis-tu, l’essence, l’âme de l’homme que je suis devenu. Je ne comprends toujours pas comment tu parviens à me regarder, à me scruter même. Moi quand je me croise dans un miroir, je prends peur. Je ne me connais pas. Je ne me trouve p