Je ferme les yeux parfois. Et je m'évade

Je ferme les yeux parfois. Et je m’évade. Je vois des paysages imaginaires mais je les visite brièvement. C’en est fini de ces grandes épopées. Quand je traversais les heures sombres de mon imaginaire en fabriquant de toutes pièces des rêves multiples et complexes. Ou pas. Au début, je m’en souvenais bien de mes rêves. Je me rappelais surtout les heures volées à la guerre où je rêvais de toi, Mareike, de tes yeux clairs et de ton sourire gracile. Tu étais ma respiration, mon repos. Je t’ai retrouvée après la Grande Guerre et des mois de convalescence. Je n’étais plus le bel homme fringant que tu avais connu. Mais tu m’as retrouvé, reconnu, malgré mes différences. Depuis nos retrouvailles, tu t’es habituée à ma gueule cassée, tu retrouves dans mes yeux, dis-tu, l’essence, l’âme de l’homme que je suis devenu. Je ne comprends toujours pas comment tu parviens à me regarder, à me scruter même. Moi quand je me croise dans un miroir, je prends peur. Je ne me connais pas. Je ne me trouve pas. Pas sous cette apparence. Je suis telle ment reconnaissant de la douceur et de la tendresse que tu m’offres. Je lis dans l’expression de ton visage, dans le sourire de tes regards et dans l’attention de tes gestes tout l’amour que tu me portes. Comment te le rendrais-je ? Je passe le temps que je ne passe pas à me nourrir et combler ainsi les vides intérieurs auxquels me livrent des jours sans fin, je passe ce temps à me le demander et à inventer des stratagèmes qui me permettent de te rendre avec joie et plénitude cet amour qui m’émeut tant. Tu crois mes nuits longues, sombres et vides. Loin d’être creuses, elles sont pleines de ta présence puisqu’au lieu de te rêver, je remplis mes nuits en te contemplant dormir. En rentrant de ma convalescence, je me disais que je finirais par ressentir une forme de lassitude et que mes yeux clos finiraient par ouvrir de grands espaces imaginaires où mon esprit digèrerait ses éveils et mon corps connaitrait une inaction ressourçante. Je me suis résolu à tenir bon, éveillé toutes les nuits, à tes côtés, à ne troquer ta présence réparatrice que contre des mets que je prépare pendant des heures en pensant à toi et ton sommeil. Tu es ma respiration et mon repos. Te regarder, t’observer me remplit d’air et entendre ton rire cristallin et tes paroles si délicates et rares me fait soupirer de plaisir. Et si je ne dors plus depuis des décennies, ta présence et ta personne me délassent. Mareike, je ferme les yeux parfois sur des rêves éveillés que tu peuples autant que ma réalité. Je ne regrette pas de ne plus pouvoir dormir car tu es l’astre de mes jours et de mes nuits. Tu sais, Mareike, tu es la saveur de mon quotidien sans cesse renouvelée et plus gouteuse à chaque instant. Mes rêves se sont singularisés. Avant de disparaitre avalés par une réalité plus belle encore. Et qui porte ton nom Mareike, toi qui rends mon insomnie aimable. J’ai perdu les élucubrations nocturnes de mon esprit mais ton odeur, ta peau, te toucher, te sentir, te goûter, t’écouter, t’entendre et te voir comblent mon imaginaire et mon âme et rassasient mes sens.

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